Règles fiscales applicables aux successions et héritages

Les règles fiscales applicables aux successions et héritages en Suisse

La fiscalité des successions en Suisse présente une complexité particulière due à son système fédéral. Chaque canton dispose de sa propre législation fiscale en matière d’héritage, créant ainsi 26 régimes différents. Cette diversité engendre des variations significatives dans le traitement fiscal des successions selon le lieu de résidence du défunt ou la situation des biens. Les taux d’imposition, les exonérations et les abattements diffèrent considérablement d’un canton à l’autre. De plus, la Suisse se caractérise par l’absence d’impôt fédéral sur les successions, renforçant l’autonomie cantonale dans ce domaine. Cette spécificité helvétique nécessite une connaissance approfondie du système pour optimiser la planification successorale et minimiser la charge fiscale des héritiers.

Le cadre juridique des successions en Suisse

Le droit successoral suisse est principalement régi par le Code civil suisse (CCS), qui établit les règles fondamentales concernant la transmission du patrimoine. Toutefois, la fiscalité des successions relève principalement du droit cantonal. Cette répartition des compétences trouve son fondement dans la Constitution fédérale qui accorde aux cantons une large autonomie en matière fiscale.

L’imposition des successions en Suisse repose sur trois principes fondamentaux. Premièrement, le principe de territorialité, selon lequel l’impôt est prélevé dans le canton où le défunt avait son dernier domicile. Deuxièmement, le principe du rattachement économique, qui permet d’imposer les biens immobiliers dans le canton où ils sont situés, indépendamment du domicile du défunt. Troisièmement, le principe de l’universalité, qui soumet à l’impôt l’ensemble du patrimoine transmis, sous réserve des conventions internationales contre la double imposition.

La loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes (LHID) fixe certains principes généraux, mais laisse une grande marge de manœuvre aux cantons. Cette autonomie se traduit par des différences significatives dans le traitement fiscal des successions d’un canton à l’autre.

Les différences cantonales majeures

Les disparités entre cantons se manifestent principalement dans les aspects suivants :

  • Les taux d’imposition, qui peuvent varier de 0% à plus de 50% selon le canton et le degré de parenté
  • Les exonérations accordées à certains héritiers (conjoint, descendants directs)
  • Les abattements à la base
  • Les modalités de calcul de l’impôt
  • Les règles d’évaluation des biens

Par exemple, le canton de Schwyz n’impose pas les successions, tandis que d’autres cantons comme Vaud ou Neuchâtel appliquent des taux progressifs pouvant atteindre des niveaux significatifs pour les héritiers sans lien de parenté.

Cette diversité cantonale crée un véritable paysage fiscal hétérogène qui peut influencer les stratégies de planification successorale et même les choix de résidence des personnes fortunées en Suisse.

L’imposition selon le degré de parenté

Le lien de parenté entre le défunt et l’héritier constitue un facteur déterminant dans le calcul de l’impôt successoral en Suisse. Les cantons classent généralement les héritiers en plusieurs catégories selon leur degré de parenté, chacune étant soumise à un régime fiscal distinct.

La première catégorie comprend habituellement le conjoint ou le partenaire enregistré. Dans la majorité des cantons, ces derniers bénéficient d’une exonération totale de l’impôt sur les successions. Cette mesure vise à protéger le conjoint survivant en lui permettant de conserver l’intégralité du patrimoine transmis.

La deuxième catégorie concerne les descendants directs (enfants, petits-enfants). La tendance actuelle en Suisse est à l’exonération des descendants directs. Actuellement, 19 cantons sur 26 exonèrent complètement les enfants de l’impôt sur les successions. Dans les cantons qui maintiennent cette imposition, les taux sont généralement modérés et des abattements substantiels sont prévus.

La troisième catégorie englobe les ascendants directs (parents, grands-parents). Leur traitement fiscal varie considérablement selon les cantons, allant de l’exonération totale à une imposition modérée.

La quatrième catégorie inclut les frères et sœurs, neveux et nièces. Ces héritiers sont soumis à des taux d’imposition plus élevés dans la plupart des cantons.

Enfin, la dernière catégorie regroupe les personnes sans lien de parenté avec le défunt. Ces héritiers supportent généralement la charge fiscale la plus lourde, avec des taux pouvant atteindre 50% dans certains cantons comme Genève.

Exemples de taux d’imposition par canton

Pour illustrer ces différences, voici quelques exemples de traitement fiscal selon les cantons :

  • À Genève, les conjoints et descendants directs sont exonérés, mais les frères et sœurs sont imposés jusqu’à 22%, et les non-parents jusqu’à 54,6%
  • Dans le canton de Vaud, les conjoints sont exonérés, les descendants directs sont imposés à un taux maximum de 7%, les frères et sœurs jusqu’à 25%, et les non-parents jusqu’à 50%
  • Le canton de Zurich exonère les conjoints et les descendants directs, impose les frères et sœurs à un taux maximum de 6%, et les non-parents jusqu’à 36%
  • Les cantons de Schwyz et Obwald n’appliquent aucun impôt sur les successions, quel que soit le degré de parenté

Ces variations significatives démontrent l’importance d’une analyse approfondie de la situation fiscale dans le cadre d’une planification successorale en Suisse.

Évaluation du patrimoine successoral

L’évaluation des biens constituant la succession représente une étape cruciale dans la détermination de l’assiette fiscale. Les règles d’évaluation peuvent varier d’un canton à l’autre, mais certains principes généraux s’appliquent sur l’ensemble du territoire suisse.

Les biens immobiliers sont généralement évalués selon leur valeur vénale, c’est-à-dire leur valeur marchande au moment du décès. Toutefois, certains cantons appliquent des méthodes d’évaluation spécifiques qui peuvent aboutir à une valeur fiscale inférieure à la valeur réelle du bien. Par exemple, dans le canton de Vaud, la valeur fiscale des immeubles correspond à 80% de leur valeur vénale.

Les biens mobiliers (meubles, objets d’art, bijoux, véhicules) sont évalués à leur valeur marchande au jour du décès. Pour certains biens dont la valeur est difficile à déterminer, l’administration fiscale peut recourir à des expertises.

Les avoirs financiers (comptes bancaires, titres, actions, obligations) sont pris en compte pour leur valeur nominale ou leur cours boursier au jour du décès. Les assurances-vie font l’objet d’un traitement particulier selon qu’elles sont rachetables ou non.

Pour les entreprises et participations dans des sociétés non cotées, l’évaluation peut s’avérer complexe. Les méthodes utilisées combinent généralement la valeur de rendement et la valeur substantielle de l’entreprise. Des règles spécifiques peuvent s’appliquer pour faciliter la transmission d’entreprises familiales dans certains cantons.

Déductions et passifs déductibles

L’assiette de l’impôt est constituée par l’actif net de la succession, c’est-à-dire l’actif brut diminué des passifs déductibles. Parmi ces derniers figurent :

  • Les dettes du défunt existant au jour du décès
  • Les frais funéraires
  • Les frais liés à l’ouverture de la succession
  • Dans certains cantons, les frais médicaux des dernières années

Certains cantons accordent également des abattements forfaitaires qui viennent réduire la base imposable. Par exemple, dans le canton de Genève, chaque héritier bénéficie d’un abattement de 10’000 CHF avant application du barème d’imposition.

L’évaluation précise du patrimoine successoral nécessite une connaissance approfondie des règles cantonales applicables. Une sous-évaluation peut entraîner des redressements fiscaux, tandis qu’une surévaluation conduirait à un impôt excessif. Notre étude d’avocats dispose de l’expertise nécessaire pour garantir une évaluation conforme aux exigences légales tout en optimisant la situation fiscale des héritiers.

Planification successorale et optimisation fiscale

La diversité des régimes fiscaux cantonaux en matière de succession offre des opportunités significatives d’optimisation fiscale. Une planification successorale judicieuse permet de réduire substantiellement la charge fiscale des héritiers tout en respectant le cadre légal suisse.

Le choix du domicile constitue un levier majeur d’optimisation. Les différences de traitement fiscal entre cantons peuvent justifier un changement de résidence pour les personnes disposant d’un patrimoine conséquent. Toutefois, ce changement doit être effectif et non fictif, sous peine d’être remis en cause par les autorités fiscales.

La donation de son vivant représente une autre stratégie efficace. Dans de nombreux cantons, les donations bénéficient d’un régime fiscal plus favorable que les successions. De plus, certains cantons prévoient un délai au-delà duquel les donations ne sont plus prises en compte dans la succession (généralement trois ans). Une planification échelonnée des donations permet ainsi de réduire progressivement l’assiette imposable de la future succession.

L’utilisation de structures juridiques adaptées peut également contribuer à l’optimisation fiscale. La création d’une fondation de famille, bien que soumise à des conditions strictes en droit suisse, peut dans certains cas présenter des avantages fiscaux. De même, la mise en place de structures sociétaires peut faciliter la transmission d’entreprises familiales.

Le testament et le pacte successoral

La rédaction d’un testament ou la conclusion d’un pacte successoral permettent d’organiser sa succession conformément à ses souhaits, tout en tenant compte des implications fiscales. Ces instruments juridiques offrent la possibilité de :

  • Répartir les biens de manière optimale entre les héritiers
  • Prévoir des legs spécifiques en faveur de personnes ou d’organisations bénéficiant d’un régime fiscal favorable
  • Organiser la transmission d’entreprises dans des conditions fiscalement avantageuses

Le pacte successoral présente l’avantage supplémentaire d’être contraignant pour toutes les parties signataires, ce qui sécurise davantage la planification successorale.

Il convient de souligner que toute stratégie d’optimisation fiscale doit respecter les limites imposées par le droit civil suisse, notamment les règles relatives à la réserve héréditaire qui protègent certains héritiers contre une exhérédation totale.

Une planification successorale efficace nécessite une approche globale prenant en compte non seulement les aspects fiscaux mais également les objectifs personnels et familiaux. Notre étude d’avocats accompagne les clients dans cette démarche en proposant des solutions sur mesure adaptées à chaque situation particulière.

Aspects internationaux et conventions fiscales

Dans un contexte de mobilité internationale croissante, les successions comportant des éléments d’extranéité soulèvent des problématiques fiscales complexes. La Suisse, en tant que place financière internationale, est particulièrement concernée par ces questions transfrontalières.

Le risque de double imposition constitue la préoccupation majeure dans les successions internationales. En effet, plusieurs États peuvent revendiquer le droit d’imposer une même succession en fonction de critères différents : domicile du défunt, nationalité, situation des biens. Cette situation peut conduire à une charge fiscale cumulée particulièrement lourde.

Pour remédier à ce problème, la Suisse a conclu des conventions contre la double imposition en matière successorale avec plusieurs pays, notamment l’Allemagne, l’Autriche, les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Ces conventions déterminent quel État est compétent pour imposer les différents éléments de la succession et prévoient des mécanismes d’élimination de la double imposition.

En l’absence de convention, le droit interne suisse prévoit généralement des mesures unilatérales d’évitement de la double imposition. La plupart des cantons accordent un crédit d’impôt pour les impôts payés à l’étranger sur des biens situés hors de Suisse.

Situation des résidents étrangers en Suisse

Les résidents étrangers en Suisse sont soumis aux règles fiscales suisses concernant les successions. Leur patrimoine mondial est imposable en Suisse, sous réserve des conventions internationales. Certaines spécificités méritent d’être soulignées :

  • Les biens immobiliers situés à l’étranger sont généralement imposés dans l’État de situation, avec application d’un crédit d’impôt en Suisse
  • Les avoirs bancaires et les valeurs mobilières détenus en Suisse par des non-résidents peuvent, selon les cantons, être exonérés d’impôt successoral
  • Les trusts et autres structures patrimoniales étrangères font l’objet d’un traitement fiscal particulier qui varie selon les cantons

Les étrangers résidant en Suisse au bénéfice d’un forfait fiscal (imposition d’après la dépense) doivent porter une attention particulière à leur planification successorale. En effet, le décès d’un contribuable imposé au forfait peut entraîner des conséquences fiscales significatives pour ses héritiers.

La mobilité internationale accrue des personnes et des patrimoines génère des situations de plus en plus complexes nécessitant une expertise pointue. Notre étude d’avocats dispose de spécialistes en fiscalité internationale capables d’analyser les implications transfrontalières des successions et de proposer des solutions adaptées.

L’anticipation des questions internationales dans la planification successorale s’avère fondamentale pour éviter les surprises fiscales. Une analyse préalable des conventions applicables et des règles de conflit de lois permet d’identifier les risques et les opportunités liés aux éléments internationaux d’une succession.

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