Effets de la faillite sur les employés et les contrats de travail

Les effets de la faillite sur les employés et les contrats de travail en Suisse

La faillite d’une entreprise en Suisse constitue un événement majeur avec des répercussions directes sur les employés, leurs droits et leurs contrats de travail. Le droit suisse prévoit un cadre légal spécifique pour protéger les salariés face à cette situation, tout en établissant un équilibre entre leurs intérêts et ceux des créanciers. La procédure de faillite, régie principalement par la Loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP), s’accompagne de dispositions particulières issues du Code des obligations (CO) concernant les rapports de travail. Ces mécanismes juridiques déterminent le sort des contrats, les créances salariales et les diverses protections accordées aux travailleurs. Notre étude d’avocats accompagne régulièrement employeurs et salariés confrontés à ces situations complexes, en apportant l’expertise nécessaire pour naviguer dans ce cadre légal particulier.

Statut juridique des contrats de travail lors d’une faillite

Le prononcé de la faillite d’une entreprise ne met pas automatiquement fin aux contrats de travail en droit suisse. Cette nuance fondamentale différencie le régime suisse de certains systèmes juridiques étrangers. En effet, l’article 333 du Code des obligations, qui régit habituellement le transfert des rapports de travail lors d’une cession d’entreprise, ne s’applique pas dans le contexte d’une faillite ou d’un concordat avec abandon d’actifs.

Les contrats de travail subsistent donc après l’ouverture de la faillite, mais leur avenir dépend directement des décisions prises par l’administration de la faillite. Celle-ci dispose de trois options principales :

  • Continuer l’exploitation de l’entreprise temporairement, maintenant ainsi les contrats de travail
  • Vendre l’entreprise à un repreneur, avec possibilité de transfert des contrats
  • Mettre fin aux contrats de travail en respectant les délais légaux ou contractuels

La masse en faillite devient l’employeur de fait, se substituant à l’entreprise faillie. Les salaires dus après l’ouverture de la faillite constituent des dettes de la masse, bénéficiant d’un traitement prioritaire par rapport aux créances antérieures à la faillite.

Délais de résiliation applicables

Si l’administration de la faillite décide de résilier les contrats de travail, elle doit respecter les délais légaux de congé prévus à l’article 335c CO, soit :

  • 1 mois durant la première année de service
  • 2 mois de la deuxième à la neuvième année de service
  • 3 mois dès la dixième année de service

Ces délais peuvent être modifiés par convention écrite, contrat-type de travail ou convention collective, sans toutefois être inférieurs à un mois sauf exception. Une particularité du droit suisse réside dans le fait que la masse en faillite, en tant que nouvel employeur, ne peut invoquer une résiliation avec effet immédiat pour juste motif uniquement sur la base de la faillite elle-même. D’autres circonstances graves doivent justifier une telle mesure.

Il convient de noter que les travailleurs peuvent eux-mêmes résilier leur contrat avec effet immédiat s’ils estiment que la continuation des rapports de travail n’est plus envisageable en raison de l’incertitude créée par la faillite, particulièrement concernant le paiement des salaires futurs.

Protection des créances salariales des employés

Le droit suisse accorde une protection particulière aux créances salariales dans le cadre d’une faillite, reconnaissant la vulnérabilité des travailleurs face à cette situation. Cette protection s’articule autour de trois mécanismes principaux : le privilège dans la collocation, l’assurance-chômage et l’action en responsabilité contre les administrateurs.

Privilège dans la collocation des créances

L’article 219 LP établit un système de privilèges qui place certaines créances des travailleurs dans la deuxième classe des créanciers. Ce privilège concerne :

  • Les créances résultant du contrat de travail nées dans les six mois précédant l’ouverture de la faillite
  • Les créances résultant d’une résiliation anticipée du contrat de travail pour cause de faillite
  • Les créances de prévoyance professionnelle envers les institutions de prévoyance

Ce traitement préférentiel augmente significativement les chances pour les employés de récupérer leurs créances salariales impayées, bien que le dividende de faillite reste souvent insuffisant pour couvrir l’intégralité des montants dus.

L’indemnité en cas d’insolvabilité de l’assurance-chômage

Pour pallier les insuffisances potentielles du dividende de faillite, le législateur suisse a mis en place un système d’indemnisation par l’assurance-chômage. Selon les articles 51 à 58 de la Loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire (LACI), les travailleurs peuvent bénéficier d’une indemnité en cas d’insolvabilité de leur employeur.

Cette indemnité couvre :

  • Les salaires impayés des quatre derniers mois du rapport de travail
  • Les indemnités dues en cas de résiliation abusive ou injustifiée
  • Les indemnités de vacances et jours fériés
  • Les allocations contractuelles

Le plafond de cette indemnisation est fixé au montant maximal du gain assuré dans l’assurance-accidents obligatoire (actuellement 148’200 CHF par an). Les travailleurs doivent déposer leur demande dans un délai de 60 jours à compter de la publication de la faillite dans la Feuille officielle suisse du commerce (FOSC).

L’assurance-chômage, après avoir versé ces indemnités, est subrogée dans les droits des travailleurs et devient créancière de la masse en faillite à hauteur des montants versés.

Transfert d’entreprise en cas de faillite

Le transfert d’une entreprise ou d’une partie d’entreprise dans le cadre d’une procédure de faillite présente des particularités juridiques significatives en droit suisse. Contrairement aux cessions ordinaires d’entreprises, l’article 333 alinéa 1 CO relatif au transfert automatique des rapports de travail ne s’applique pas dans ce contexte spécifique.

Cette exception, introduite par une révision législative en 2004, vise à faciliter les reprises d’entreprises en difficulté et à préserver l’emploi dans la mesure du possible. Elle permet au repreneur de sélectionner les contrats de travail qu’il souhaite maintenir, sans être contraint de reprendre l’ensemble du personnel.

Mécanisme de reprise sélective des contrats

En pratique, le transfert des contrats de travail dans le cadre d’une faillite suit un processus en plusieurs étapes :

  • L’administration de la faillite négocie avec le repreneur potentiel
  • Le repreneur identifie les employés qu’il souhaite conserver
  • De nouveaux contrats de travail sont proposés aux employés sélectionnés
  • Les employés non repris voient leur contrat résilié par l’administration de la faillite

Cette flexibilité accordée au repreneur constitue un incitatif majeur pour favoriser la reprise d’entreprises en difficulté. Elle permet d’adapter la structure du personnel aux besoins économiques du repreneur et d’éviter que le poids social de la reprise ne compromette sa viabilité.

Néanmoins, cette exception au principe du transfert automatique ne dispense pas le repreneur de respecter certaines obligations. Les conventions collectives de travail doivent être maintenues jusqu’à leur échéance, sauf si elles sont résiliées avant terme. De plus, le repreneur reste tenu par les dispositions régissant le licenciement collectif s’il envisage des réductions d’effectifs significatives après la reprise.

Pour les employés, cette situation crée une incertitude quant à la continuité de leur emploi. Notre étude d’avocats accompagne régulièrement les salariés dans cette phase délicate, en analysant les propositions du repreneur et en négociant des conditions de transfert favorables lorsque cela s’avère possible.

Procédures de licenciement collectif en cas de faillite

La faillite d’une entreprise conduit souvent à des licenciements massifs, ce qui déclenche l’application des dispositions relatives aux licenciements collectifs prévues aux articles 335d à 335g du Code des obligations. Ces règles s’appliquent lorsque l’employeur envisage de licencier un nombre minimum d’employés dans un délai de 30 jours pour des motifs non inhérents à leur personne.

Les seuils déclenchant la procédure de licenciement collectif sont :

  • 10 travailleurs dans une entreprise employant habituellement entre 20 et 100 personnes
  • 10% des travailleurs dans une entreprise employant habituellement entre 100 et 300 personnes
  • 30 travailleurs dans une entreprise employant habituellement plus de 300 personnes

Obligations procédurales spécifiques

Dans le cadre d’une faillite, l’administration de la faillite, qui se substitue à l’employeur, doit respecter plusieurs obligations procédurales :

  • Consultation préalable de la représentation des travailleurs ou, à défaut, des travailleurs eux-mêmes
  • Information écrite sur les motifs du licenciement collectif, le nombre de travailleurs concernés, l’effectif habituel et la période pendant laquelle les congés seront donnés
  • Notification à l’office cantonal du travail

L’administration de la faillite doit donner aux travailleurs l’opportunité de formuler des propositions sur les moyens d’éviter les congés ou d’en limiter le nombre, ainsi que d’en atténuer les conséquences. Elle doit transmettre à l’office cantonal du travail une copie de cette notification.

Une particularité du droit suisse réside dans le fait que les licenciements prononcés dans le cadre d’une faillite ne prennent effet qu’après un délai de 30 jours suivant la notification à l’office cantonal du travail, sauf si celui-ci accorde une dérogation. Cette période permet théoriquement d’explorer des alternatives au licenciement, bien que dans le contexte d’une faillite, les options soient souvent limitées.

Le non-respect de ces procédures n’entraîne pas la nullité des licenciements mais peut donner lieu à des indemnités pour licenciement abusif, pouvant atteindre jusqu’à deux mois de salaire. Ces créances s’ajoutent aux créances privilégiées dans la procédure de faillite.

Accompagnement juridique des parties prenantes

La complexité des situations de faillite et leurs impacts sur les contrats de travail nécessitent un accompagnement juridique spécialisé, tant pour les employeurs que pour les salariés. Notre étude d’avocats intervient dans ce contexte pour clarifier les droits et obligations de chaque partie et proposer des stratégies adaptées aux circonstances particulières.

Conseils aux employés face à la faillite

Pour les employés confrontés à la faillite de leur employeur, plusieurs actions sont recommandées :

  • Produire rapidement leurs créances dans la faillite avec les justificatifs nécessaires
  • Déposer une demande d’indemnité en cas d’insolvabilité auprès de l’assurance-chômage
  • S’inscrire au chômage dans les délais légaux pour préserver leurs droits
  • Vérifier la conformité des procédures de licenciement
  • Négocier avec un éventuel repreneur les conditions d’un nouveau contrat

Notre étude d’avocats accompagne les salariés dans ces démarches, en veillant notamment à ce que toutes leurs créances (salaires, indemnités de vacances, heures supplémentaires, etc.) soient correctement valorisées et produites dans la faillite. Nous les assistons dans leurs relations avec l’assurance-chômage et dans l’évaluation des offres éventuelles d’un repreneur.

Soutien aux administrateurs et repreneurs

Pour les administrateurs d’entreprises en difficulté, notre étude fournit des conseils préventifs sur les obligations légales en matière sociale, notamment concernant le paiement des cotisations sociales et la préservation des droits des employés en cas de restructuration ou de cessation d’activité.

Les repreneurs potentiels bénéficient de notre expertise pour :

  • Structurer juridiquement la reprise d’actifs
  • Sélectionner les contrats de travail à maintenir
  • Négocier avec l’administration de la faillite
  • Établir de nouveaux contrats de travail conformes
  • Gérer les relations avec les partenaires sociaux

Cette phase de transition requiert une attention particulière aux aspects sociaux, qui peuvent avoir un impact significatif sur la réussite de la reprise et sur l’image de l’entreprise auprès des clients et fournisseurs.

L’évolution récente de la jurisprudence du Tribunal fédéral a précisé plusieurs aspects concernant les droits des travailleurs en cas de faillite, notamment sur la qualification des créances salariales comme dettes de la masse et sur l’étendue de la responsabilité des administrateurs. Notre étude d’avocats maintient une veille juridique constante sur ces développements pour offrir des conseils actualisés et pertinents à nos clients.

En définitive, l’accompagnement juridique dans les situations de faillite vise à préserver au mieux les droits des travailleurs tout en facilitant, lorsque cela est possible, la continuation de l’activité économique sous une forme restructurée. Cette approche équilibrée contribue à minimiser les impacts sociaux négatifs tout en favorisant le redéploiement des compétences et des ressources dans le tissu économique suisse.

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