La Suisse se positionne comme un centre névralgique pour l’innovation financière, particulièrement dans le domaine des cryptomonnaies et des stablecoins. Ce pays alpin a développé un cadre réglementaire sophistiqué qui favorise l’innovation tout en protégeant les investisseurs. Les stablecoins, ces cryptomonnaies dont la valeur est adossée à des actifs traditionnels, bénéficient d’une attention particulière des autorités suisses. La FINMA (Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers) a établi des lignes directrices claires pour leur classification et leur régulation. Notre étude d’avocats accompagne les entreprises dans la navigation de ce cadre juridique complexe, offrant expertise et conseil personnalisé pour se conformer aux exigences réglementaires tout en optimisant les opportunités d’affaires dans cet écosystème en pleine maturation.
Cadre juridique des stablecoins en Suisse
Le système juridique suisse aborde les stablecoins non pas comme une catégorie uniforme, mais selon leurs caractéristiques spécifiques et leur fonctionnement. La FINMA a établi une approche fondée sur le principe « same business, same rules » (mêmes activités, mêmes règles), appliquant les réglementations existantes aux nouvelles technologies selon leur finalité économique.
En Suisse, les stablecoins sont généralement classés dans l’une des catégories suivantes :
- Jetons de paiement (payment tokens)
- Jetons d’utilité (utility tokens)
- Jetons d’actifs (asset tokens)
- Jetons hybrides (combinant plusieurs caractéristiques)
La loi sur l’infrastructure des marchés financiers (LIMF), la loi sur les banques (LB) et la loi sur la lutte contre le blanchiment d’argent (LBA) constituent le socle réglementaire applicable aux stablecoins. Selon leur conception, certains stablecoins peuvent être soumis à l’obligation d’obtenir une licence bancaire, notamment si leur émetteur accepte des dépôts du public ou émet des moyens de paiement.
La FINMA a précisé sa position en 2019 dans un guide pratique sur les stablecoins, distinguant plusieurs sous-catégories en fonction de leur mécanisme de stabilisation :
- Stablecoins liés à des devises
- Stablecoins liés à des matières premières
- Stablecoins liés à des biens immobiliers
- Stablecoins liés à des titres
- Stablecoins algorithmiques
Pour chaque catégorie, des exigences réglementaires différentes s’appliquent. Par exemple, un stablecoin adossé à un panier de devises pourrait être considéré comme un placement collectif de capitaux et être soumis à la loi sur les placements collectifs (LPCC).
La Blockchain Act (loi fédérale sur l’adaptation du droit fédéral aux développements de la technologie des registres électroniques distribués), entrée en vigueur en 2021, a considérablement renforcé la sécurité juridique pour les émetteurs de stablecoins en Suisse, notamment en clarifiant le traitement des actifs numériques en cas d’insolvabilité et en facilitant leur transfert.
Exigences de conformité pour les émetteurs
Les émetteurs de stablecoins en Suisse doivent satisfaire à plusieurs obligations réglementaires, dont la rigueur varie selon la nature du token émis. Ces exigences comprennent généralement l’identification des clients (KYC), la lutte contre le blanchiment d’argent, la surveillance des transactions suspectes et la protection des données personnelles.
Types de stablecoins et leur traitement réglementaire
La diversité des stablecoins nécessite une compréhension nuancée de leurs mécanismes et des implications juridiques associées. En Suisse, le traitement réglementaire varie significativement selon le type de stablecoin concerné.
Stablecoins adossés à des monnaies fiduciaires
Ces stablecoins, comme l’USDC ou le XCHF (CryptoFranc), maintiennent leur valeur grâce à des réserves équivalentes en monnaies traditionnelles. En Suisse, ils sont généralement considérés comme des moyens de paiement et sont soumis à la LBA.
L’émetteur doit garantir que :
- Les réserves sont détenues de manière sécurisée, souvent auprès d’institutions financières réglementées
- Les audits réguliers confirment l’adéquation entre les tokens en circulation et les réserves
- La conversion entre le stablecoin et la monnaie fiduciaire est possible à tout moment
Si l’émission s’apparente à l’acceptation de dépôts du public, une licence bancaire peut être requise, bien que des exemptions existent pour certains modèles commerciaux innovants grâce à la « sandbox » réglementaire suisse.
Stablecoins adossés à des matières premières
Les stablecoins liés à l’or, à l’argent ou à d’autres matières premières combinent souvent les caractéristiques des jetons de paiement et des jetons d’actifs. Leur traitement juridique est déterminé par la structure spécifique du token et la manière dont les actifs sous-jacents sont détenus.
Si le stablecoin représente un droit de propriété direct sur l’or physique, il pourrait être considéré comme un jeton d’actif. En revanche, s’il s’agit simplement d’une créance contractuelle contre l’émetteur, d’autres règles s’appliquent.
La FINMA examine attentivement si ces produits constituent des dérivés, des valeurs mobilières ou des placements collectifs de capitaux, chaque qualification entraînant des obligations différentes.
Stablecoins algorithmiques
Ces stablecoins, qui maintiennent leur valeur par des mécanismes algorithmiques plutôt que par des réserves d’actifs, représentent un défi réglementaire particulier. Leur classification dépend largement de leur fonctionnement spécifique.
La FINMA adopte une approche au cas par cas pour ces tokens, évaluant leurs caractéristiques économiques réelles plutôt que leur description technique. Les émetteurs doivent généralement démontrer la robustesse de leur mécanisme de stabilisation et la transparence de leur gouvernance.
Dans ce contexte complexe, notre étude d’avocats fournit une analyse juridique détaillée des projets de stablecoins avant leur lancement, identifiant les risques réglementaires et proposant des structures optimisées pour la conformité.
Obligations en matière de lutte contre le blanchiment d’argent
La Suisse applique des normes strictes en matière de lutte contre le blanchiment d’argent (LBA) aux acteurs du secteur des cryptomonnaies, y compris aux émetteurs et intermédiaires de stablecoins. Ces obligations constituent un pilier fondamental de la réglementation suisse des actifs numériques.
Les entités impliquées dans l’émission ou le négoce de stablecoins sont généralement considérées comme des intermédiaires financiers selon la LBA et doivent :
- S’affilier à un organisme d’autorégulation (OAR) reconnu par la FINMA ou se soumettre directement à sa surveillance
- Établir des procédures robustes de vérification d’identité des clients (KYC)
- Identifier les ayants droit économiques des fonds
- Mettre en place des systèmes de surveillance des transactions
- Signaler les transactions suspectes au Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent (MROS)
Les obligations varient selon le modèle d’affaires et le volume des transactions. Pour les stablecoins à grande échelle, des exigences supplémentaires peuvent s’appliquer, notamment concernant la gouvernance des réserves et la transparence des opérations.
Approche basée sur les risques
La Suisse privilégie une approche basée sur les risques pour la surveillance LBA. Les émetteurs de stablecoins doivent catégoriser leurs clients selon différents profils de risque et appliquer des mesures de diligence renforcées pour les situations à haut risque.
Les facteurs de risque comprennent :
- La juridiction d’origine des clients
- Le volume et la fréquence des transactions
- L’utilisation de technologies renforçant l’anonymat
- La complexité des structures de propriété
La FINMA a récemment renforcé ses exigences concernant le « travel rule », obligeant les prestataires de services d’actifs virtuels à échanger des informations sur l’expéditeur et le bénéficiaire lors de transferts de cryptomonnaies, y compris de stablecoins. Cette règle s’applique désormais dès le premier franc suisse, sans seuil minimum.
Notre étude d’avocats accompagne les émetteurs dans la mise en place de programmes de conformité LBA adaptés à leur modèle d’affaires, en tenant compte des spécificités des stablecoins et des dernières évolutions réglementaires.
Protection des investisseurs et exigences de transparence
La protection des investisseurs constitue une préoccupation majeure pour les autorités suisses dans le domaine des stablecoins. Contrairement aux cryptomonnaies traditionnelles comme le Bitcoin, les stablecoins créent des attentes spécifiques quant à leur stabilité et leur convertibilité, ce qui justifie des exigences de transparence renforcées.
La FINMA attend des émetteurs de stablecoins qu’ils fournissent une documentation claire et complète, notamment :
- La nature exacte des droits associés au token
- La composition et la gestion des réserves
- Les mécanismes de stabilisation du cours
- Les procédures de rachat ou de conversion
- Les risques spécifiques liés au produit
Ces informations doivent être facilement accessibles aux investisseurs potentiels et formulées de manière compréhensible, évitant tout jargon technique excessif ou promesses trompeuses.
Gouvernance des réserves
Pour les stablecoins adossés à des actifs, la gouvernance des réserves représente un aspect critique. La FINMA examine attentivement :
- La ségrégation des actifs de réserve par rapport aux autres actifs de l’émetteur
- Les mécanismes de protection en cas d’insolvabilité
- La qualité et la diversification des actifs de réserve
- La fréquence et la méthodologie des audits
La loi sur les services financiers (LSFin) peut s’appliquer si le stablecoin est qualifié d’instrument financier, imposant des obligations supplémentaires en matière d’information des clients et de documentation.
Les projets d’envergure systémique, comme le proposait initialement Libra/Diem (qui avait choisi la Suisse comme juridiction), font l’objet d’un examen particulièrement rigoureux et peuvent nécessiter des garanties supplémentaires pour protéger la stabilité du système financier.
Notre étude d’avocats aide les émetteurs à concevoir des structures de gouvernance robustes et transparentes, répondant aux attentes réglementaires tout en préservant l’innovation technologique.
Implications pratiques pour les acteurs du marché
La régulation des stablecoins en Suisse présente des défis et des opportunités concrets pour les acteurs du marché. La clarté relative du cadre juridique suisse attire de nombreux projets, mais requiert une compréhension approfondie des nuances réglementaires.
Stratégies de mise en conformité
Pour les émetteurs de stablecoins souhaitant opérer en Suisse, plusieurs considérations pratiques s’imposent :
- La structure juridique de l’entité émettrice (fondation, société anonyme, etc.)
- Le modèle de gouvernance des réserves et la ségrégation des actifs
- Les partenariats bancaires nécessaires pour la garde des actifs de réserve
- Les procédures de vérification KYC/AML adaptées au marché cible
- La documentation juridique complète (conditions générales, politique de confidentialité, etc.)
Les choix effectués lors de la structuration initiale ont des conséquences durables sur la viabilité réglementaire du projet. Une analyse préalable approfondie permet d’éviter des restructurations coûteuses ou des blocages réglementaires ultérieurs.
Avantages du cadre suisse
Le système juridique suisse offre plusieurs avantages pour les projets de stablecoins :
- Une approche réglementaire basée sur les principes plutôt que sur des règles rigides
- Une ouverture au dialogue avec les régulateurs avant le lancement
- Un écosystème financier sophistiqué avec des institutions expérimentées dans la gestion d’actifs numériques
- Une stabilité politique et juridique favorisant les projets à long terme
- La reconnaissance internationale de la réglementation suisse, facilitant l’expansion mondiale
Ces avantages doivent être mis en balance avec les exigences strictes en matière de conformité et les coûts associés à l’établissement en Suisse.
Collaboration avec les régulateurs
La FINMA encourage le dialogue précoce avec les innovateurs financiers. Les émetteurs de stablecoins peuvent solliciter des clarifications sur le traitement réglementaire de leur projet spécifique avant de s’engager dans des investissements substantiels.
Cette approche collaborative nécessite une préparation minutieuse. Notre étude d’avocats accompagne les porteurs de projets dans leurs interactions avec les autorités réglementaires, en préparant des dossiers complets qui anticipent les préoccupations des régulateurs et proposent des solutions conformes.
Nous assistons nos clients dans l’obtention des licences nécessaires, la rédaction de la documentation juridique conforme aux exigences suisses, et la mise en place de structures de gouvernance robustes. Notre connaissance approfondie de l’environnement réglementaire suisse et notre expérience dans l’accompagnement de projets innovants nous permettent d’offrir des conseils pragmatiques, adaptés aux réalités du marché des stablecoins.
Face à l’évolution constante du cadre réglementaire, une veille juridique permanente s’avère indispensable. Les émetteurs de stablecoins doivent rester attentifs aux modifications réglementaires et adapter leurs processus en conséquence, une tâche pour laquelle l’accompagnement par une étude d’avocats spécialisée représente un atout considérable.